Le lapin du Québec

1/4/2020
Vedette du mois

Visualise 5 cm d’oreilles paraboliques capables de détecter les moindres sons et leur direction. On ajoute des pattes qui font le tiers de la longueur totale de son petit corps rond. Le tout est couvert d’un pelage brun à l’année. Et on complète avec une queue blanche aussi touffue qu’une boule de coton, qui lui a valu son nom (dans les 2 langues). On te parle de la seule espèce indigène de lapin du Québec : lapin à queue blanche (l’eastern cottontail rabbit).  

On trouve ce mammifère nocturne (ou plus précisément crépusculaire) dans les milieux semi-ouverts, comme les prairies et les lisières, et même en zones urbaines. Son aire de répartition est concentrée au sud-ouest du Québec dans les basses-terres du Saint-Laurent, mais s’étend au sud jusqu’en Amérique du Sud.  

Powerhouse de bébés

Les lapins à queue blanche sont de véritables machines à reproduction. Une femelle, qui atteint la maturité sexuelle dès sa première année de vie, peut avoir jusqu’à 4 portées de 2 à 8 petits par année. Fais le calcul : c’est une possibilité de 32 rejetons multipliée par une longévité moyenne en nature de 3 ans donnant un grand total de 96 bébés par femelle en santé.  

Mais avant de produire, il faut séduire. La parade nuptiale des lapins à queue blanche est plus acrobatique que romantique. De manière générale, ils se font la cour en bondissant dans tous les sens. Le mâle pourchasse la femelle jusqu’à ce qu’elle le confronte. Et dans un élan séducteur, elle lui envoie un coup de patte dans la face. #rabbitpunch Puis, ils se scrutent longuement. Et pour la grande finale, le mâle bondit haut dans les airs tandis que la femelle passe sous lui. Puis la routine recommence encore et encore.  

Rien de trop beau pour les petits

Pour chaque portée, la femelle travaille fort pour le confort (et le succès) de ses petits qui naissent nus et aveugles. Elle creuse une cavité peu profonde, coussinée de plantes et de son propre poil, sous un buisson ou dans les herbes hautes. La femelle ne reste pas continuellement sur le nid; elle s’en éloigne, évitant ainsi d’attirer l’attention des prédateurs. Les petits restent couverts dans le nid pour quelques semaines, jusqu’à ce qu’ils soient autonomes. En attendant, ils se nourrissent de lait et de cæcotrophes maternelles. De quoi? Les cæcotrophes sont des rejets de la mère riches en protéines, vitamines et minéraux. Tu as bien lu, on te parle ici de manger des crottes*. C’est une pratique courante chez les animaux quand il faut maximiser les nutriments!  

Un nid douillet

Manger ou se faire manger

L’alimentation du lapin à queue est composée uniquement de végétaux (pas seulement prédigérés là). En hiver, il gruge l’écorce des arbrisseaux (comme les micromammifères subnivaux). Il n’hésite pas non plus à grignoter bourgeons, rameaux et ramilles qui sont à portée de… dent. En été, il mange des pissenlits, de la verge d’or et toutes les herbacées qu’il croise. Il est aussi connu pour faire le ménage dans les potagers et autour des fermes.  

Parce qu’ils sont si productifs, les lapins peuvent rapidement devenir too much pour un milieu**. Plus il y a de lapins, plus les ressources deviennent rares. Heureusement, la nature a une solution : une liste impressionnante de prédateurs. La réalité est que tout ce qui peut attraper un lapin le mange : du coyote à la martre, en passant par les hiboux et les ratons laveurs.  

Les lapins ne sont pas sans défense. D’abord, ils sont experts en camouflage. En plus, leurs pattes puissantes leur permettent de se sauver à presque 30 km/h. Et non seulement ce sont des p’tits vites, mais pour déstabiliser le prédateur, ils se sauvent en zigzag, créant la plus grande confusion. (Ça ne prend pas grand-chose aux prédateurs pour être confus…)

Autres léporidés du Québec

Le lapin à queue blanche fait partie de la famille des Léporidés avec ses cousins du Québec, le lièvre d’Amérique et le lièvre arctique. Ils sont de la même famille***, mais bien différents. Les lièvres se retrouvent plus au nord : les lièvres d’Amérique raffolent des forêts denses de conifères et le lièvre arctique habite la toundra. Les deux espèces naissent avec du poil et les yeux ouverts. Ils sont généralement plus gros que les lapins (le lièvre arctique étant le plus gros des deux) et ils ont des oreilles plus longues. La plus grande différence est toutefois leur pelage d’hiver. Le lapin à queue blanche conserve son pelage brun toute l’année tandis que les lièvres ont le poil blanc pendant la saison froide.  

Un lapin à queue blanche à gauche, au centre un lièvre d’Amérique dans son pelage d’été et à droite un lièvre arctique

Alors, peu importe où on se trouve au Québec, on peut croiser un de ces Léporidés. Des conseils pour les observer : sortir en matinée, c’est le moment où ils sont le plus actifs, rester silencieux et scruter sous les buissons ou à travers les branches basses.

NOTES

* La cæcotrophie est un mécanisme qu’on retrouve chez plusieurs espèces qui mangent une partie de leurs excréments. Ces herbivores ont une alimentation à base de végétaux, dont le constituant principal est la cellulose. Toutefois, leur système digestif a du mal à la décomposer en nutriments. La cellulose est donc envoyée dans une poche, le cæcum, pour finir le travail. Ici, les cæcotrophes sont créés. Ils sont ensuite éjectés et ingurgités dès l’excrétion pour profiter des nutriments maintenant digérables par l’intestin. À ce deuxième passage, les cæcotrophes passent par l’estomac qui est très acide. C’est pourquoi elles sont couvertes de mucus pour rester intactes jusqu’à l’intestin! Bon voyage les cæcotrophes!  

** C'est le cas des lapins européens qui ont été introduit en Nouvelle-Zélande autour de 1860 et qui sont rapidement devenus une véritable peste (dès 1880) parce qu'il n'y avait aucun prédateurs naturels du lapin dans le pays. Ils sont désormais considérés comme une espèce envahissante et un problème de poids pour les écosystèmes de l'île.

*** En passant, il faut ajouter qu’ils ne sont pas des rongeurs. Bien qu’ils aient une dentition similaire, les Léporidés ont deux paires d’incisives, ce qui les distingue des rongeurs.  

Par Anne Frédérique, éducatrice-naturaliste senior

Sources images :  Paul Brennan, Jhansonxi, James H., Martin Kraft, Electronker

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