Les poules de la forêt

15/12/2022
Choix du naturaliste

Imagine une poule, sauvage, libre comme l’air, au beau milieu de la forêt boréale, en train de gratter le sol pour déterrer de la nourriture. C’est une véritable scène de nos milieux forestiers, et même ailleurs. Les milieux naturels du Québec abritent une famille d’oiseaux au look de poulet, mais 100 % adaptée à la vie sauvage : les Phasianidés*.  

La perdrix grise, une poulette venue d'ailleurs

Leurs pattes sont robustes, parfaites pour courir et sauter. Bien que ces oiseaux ronds et dodus sachent voler, ils sont plus à l’aise au sol (une niche écologique qu’ils partagent avec les grives!). C’est d’ailleurs là qu’ils s’alimentent de bouts de végétaux (complétant leur diète par quelques insectes, selon la saison). C’est aussi au sol, dans de petites dépressions, qu’ils nichent. Les paires se forment après que les mâles aient démontré aux femelles leurs intentions par des parades élaborées ou des démonstrations sonores (comme le fait la gélinotte). La queue en éventail et le plumage de la tête des mâles sont souvent ponctués de plumes irisées et colorées, puis de caroncules** pour en mettre plein la vue. Après la sélection du mâle, la femelle couve ses œufs seule, comme une grande. Les femelles de nos Phasianidés, sont d’ailleurs connues pour être des mères à la dévotion sans pareil.  

La poule numéro 1

La poule sauvage la plus répandue en Amérique du Nord est la gélinotte huppée. C’est une poulette brune de grosseur moyenne à la queue rayée qui se finit par une bande foncée. Comme son nom l’indique, on la distingue par sa huppe. La gélinotte est relativement bruyante, mais pas parce qu’elle glousse sans cesse, au contraire. Généralement silencieuse, en cas d'intrusion sur son territoire, elle tambourine en frappant rapidement ses ailes sur du bois. Cela produit un bruit sourd, rappelant celui d’un moteur. Très impressionnant! (Tellement que ça fonctionne aussi pour attirer les femelles dans d’autres circonstances.)

La gélinotte huppée a plus d’un tour dans son sac pour éviter la prédation. En plus de son plumage camouflage, la femelle qui couve, ou qui a des petits, joue la comédie. Si un prédateur la repère, elle pousse des sifflements et fait semblant d’avoir une aile cassée en s’éloignant du nid. Le prédateur suit alors ce qui semble être une proie facile… Mais au dernier moment, la femelle s’envole et le prédateur est laissé les mains (ou pattes…) vides. Ingénieux!  

 

Les autres poules de la forêt

Le tétras du Canada (mâle), à gauche et celui à queue fine (à droite)

Dans les forêts du Québec, aux latitudes boréales, l’on retrouve d’autres poules amatrices de bourgeons : les tétras. Le tétras du Canada, le plus commun des deux espèces se rencontre dans les milieux coniféreux. Tu pourrais d’ailleurs le croiser sur un sentier montagneux au centre de la province, comme sur le Mont-du-Lac-des-Cygnes. C’est une petite poule sombre avec le bout de la queue rousse. Le mâle a une caroncule rouge au-dessus de l'œil. L’autre tétras, le tétras à queue fine est le seul à avoir… la queue fine et non en éventail. Il se trouve principalement à l’ouest de la province, dans les tourbières et les zones de coupe en régénérescence de l’Abitibi. Fait intéressant sur ce tétras : les mâles se regroupent dans des « arènes » pour leur parade nuptiale. Une méga production pour les femelles, pas loin du Cirque du Soleil!  

Les poules agroforestières

On est chanceux de pouvoir aussi observer des poules sauvages ailleurs que dans les bois. En lisière des forêts et dans les friches, c’est la perdrix grise que tu pourras voir. Attention de ne pas la confondre avec la gélinotte, comme on le fait trop souvent. En vérité, ces deux espèces ne pourraient pas être plus différentes. La perdrix, une espèce introduite (maintenant naturalisée), est une très petite poule grise. En contrepartie pour la petitesse de la perdrix grise (qui fait environ 30 cm), dans les champs et à l’orée des bois, on retrouve les vraiment gros poulets. On a nommé le faisan de Colchide (46-91 cm) et le dindon sauvage (91 à 122 cm). Deux espèces relativement « nouvelles » au Québec, dont les populations se déplacent tranquillement avec les hivers de plus en plus doux. Le faisan est brunâtre, avec une longue queue effilée. Le mâle a un collier blanc et la tête verte avec une caroncule imposante autour de l’œil. Le dindon mâle a le plumage foncé, avec lui aussi une caroncule sur tête. Dans les deux cas, les femelles sont plutôt brunes. Ces gros poulets arpentent les champs cultivés en quête de graines et de petits fruits.  

Un faisan mêle et une dinde femelle

Les poules des neiges

Finalement, la toundra accueille elle aussi des petites poulettes. Le lagopède des saules et le lagopède alpin sont des oiseaux du Nord, adaptés aux rigueurs des régions montagneuses et friands de bourgeons de saules. En été, pour se fondre dans les végétations basses alpine et nordique, le haut du corps est roux tacheté. Pour la saison hivernale, ils sont entièrement blancs (avec une caroncule au sourcil chez les mâles) et le bout de la queue noir, on les distingue par la bande noire sous l’œil du lagopède alpin. En hiver, ce dernier descend plus au sud et partage le territoire du lagopède des saules.  

Le lagopède des saules dans son plumage estival (à gauche) et le lagopède alpin, dans son plumage hivernal (à droite). Mention spéciale aux pattes touffues trop cute pour rester bien au chaud!

Alors, peu importe où tu te trouves au Québec, dans les régions agricoles du sud, à l’orée des boisés de feuillus, dans les denses forêts boréales, sur les hauts plateaux alpins ou dans les plaines de la toundra, y’a certainement une poule sauvage, plus ou moins grosse, plus ou moins brune, qui se tapit dans la végétation pas tellement loin.  

NOTES

* Ce groupe comprend entre autres les dindons, les faisans et les perdrix, mais aussi les cailles, les poulets sauvages et les paons.  

** Les caroncules, chez les oiseaux correspondent aux ornements rouges (en général) que portent les mâles. Les coqs ont une de ces excroissances très visible sur la tête, autour de l’œil et sur la gorge. Pour d’autres espèces, on peut aussi les retrouver au sourcil. Ces bosses un peu étranges, poussées par des fluctuations de testostérone, gonflent lorsque les mâles paradent pour les femelles. Il est à noter que nous, les humains, avons aussi des caroncules, mais elles sont assez différentes. Nous avons, entre autres, une caroncule lacrymale : la petite boule charnue au coin intérieur de l’œil.  

Par Anne-Frédérique, éducatrice-naturaliste senior

Sources images : Nicole Beaulac, Jason Ahrns, USFWS Mountain-Prairie, U.S. Government, U.S. Government, Alaska Region U.S. Fish & Wildlife Service, Gregory "Slobirdr" Smith, Frans Vandewalle

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