Le voyage de la sève

15/3/2022
Choix du naturaliste

On est en mars; les journées deviennent plus chaudes, plus ensoleillées, plus longues, et on commence à imaginer le retour de la verdure sur nos arbres et dans nos jardins. En même temps, la sève commence à couler dans les érables, le temps des sucres est entamé!

T’es-tu déjà demandé.e comment les plantes font pour faire circuler la sève de leurs racines au bout de leurs branches et vice-versa? Après tout, un arbre, c’est vraiment grand, et ils arrivent pourtant à s’approvisionner en eau, en nutriments et en sucres sans cœur pour pomper et faire circuler cette bonne soupe à travers les dizaines de mètres de tuyaux qui montent et descendent le tronc…

D’abord, il faut comprendre que les plantes vasculaires, c’est-à-dire les plantes qui possèdent des vaisseaux spécialisés pour le transport de la sève, ont deux types de tissus conducteurs avec des rôles différents : le xylème et le phloème. Tous nos arbres, arbustes, fleurs, herbes et fougères sont des plantes vasculaires. Dès qu’il y a présence de racine, tige, ou feuille, il y aura forcément des vaisseaux de xylème et phloème. En fait, ces structures sont des adaptations qui ont permis aux végétaux de conquérir le milieu terrestre, leur offrant la possibilité de s’ancrer dans la terre et absorber l’eau et les nutriments de celle-ci. (Les plantes non vasculaires, quant à elles, sont les petites plantes primitives comme les mousses et les algues qui n’ont pas de structures complexes et qui requièrent beaucoup d’humidité dans leur environnement afin de survivre, puisqu’elles absorbent l’eau directement de leur milieu.)

Alors, sachant tout ça, le xylème et le phloème, c’est quoi exactement, comment ça marche?

1- L'eau et les sels minéraux sont absorbés par les racines. 2- La sève brute est transportée vers le haut dans le tronc. 3- L’eau s’évapore par les feuilles.  4 et 5- Les feuilles captent le CO2 et rejettent le O2. 6- Les feuilles captent la lumière et produisent des glucides (photosynthèse). 7- La sève élaborée peut s’écouler entre les racines et les tiges. 8- Les racines absorbent le O2 contenu dans le sol et y rejettent du CO2.

Le xylème : ascenseur d’eau par excellence

Commençons avec le xylème. Il est formé de cellules mortes et donc vides (oui oui!) appelées trachéides ou éléments de vaisseau. Ceux-ci sont disposés bout à bout et reliés l’un à l’autre par des perforations qui forment ainsi des tubes continus facilitant la circulation de ce qu’on appelle la sève brute, composée d’eau et de nutriments (les fameux NPK sur les contenants d’engrais en magasin) puisés dans le sol (1). Le rôle du xylème est donc de transporter cette sève brute des racines vers les parties aériennes de la plante (2). C’est un système à flux directionnel, du bas vers le haut* qui peut atteindre une vitesse de 24 à 72 km/h!  

Mais tu te demandes sans doute comment ça fonctionne si la plante n’a pas de système de pompage pour faire monter la sève — après tout, nous savons tous que la gravité aura tendance à faire descendre les choses. Eh bien, ici il faut faire une petite parenthèse pour parler d’une propriété physique de l’eau, tu verras que c’est la clé du mystère. Les molécules d’eau forment des liens hydrogène entre elles; ces liens sont très forts et résistants à la cassure. C’est ce qui donne la tension de surface nous permettant de remplir un verre au-delà du rebord ou permettant à un insecte de « patiner » sur la surface d’un marais.  

Si on revient à notre plante et son tube de xylème, regardons un peu ce qu’il y a à l’autre extrémité : les feuilles. Chaque feuille est criblée d’innombrables petits trous appelés stomates par lesquels de l’eau s’évapore de l’intérieur de la feuille vers l’environnement extérieur plus sec (3). Ce phénomène appelé transpiration est responsable de la perte d’une importante quantité d’eau par les plantes—un seul plant de maïs perdra 60 L d’eau par transpiration au cours d’une saison de croissance; c’est 4 millions de litres d’eau par hectare pour un champ de maïs! Les molécules d’eau qui s’évaporent par le haut de la plante tirent sur leurs voisines par liens hydrogène, et comme toute la colonne d’eau du xylème est liée par ces liens, c’est toute la colonne d’eau qui finit par monter sous cette force d’aspiration. Un deuxième phénomène, une poussée vers le haut exercée par l’entrée de l’eau dans les racines par osmose, contribue aussi un peu à la circulation de la sève brute. Mais cette pression racinaire n’est pas assez forte pour faire circuler la sève sur toute la longueur d’un arbre, seulement sur quelques mètres au mieux. C’est vraiment l’hypothèse de cohésion-tension, soit la transpiration par les feuilles qui tire la colonne d’eau vers le haut, qui fit le mieux pour expliquer la circulation de la sève brute dans le xylème.

Le phloème : transporteur de sucres et réseau intranet

Maintenant qu’on a bien fait le tour de la sève brute et de la circulation dans le xylème, qu’en est-il du phloème mentionné tout à l’heure? Les tubes de phloème sont aussi faits de cellules reliées bout à bout, appelés cellules criblées chez les fougères et conifères, et éléments de tubes criblés chez les plantes à fleurs (incluant les feuillus). Contrairement aux cellules du xylème, celles du phloème sont vivantes, maintenues en vie, malgré qu’elles soient presque vide, par des cellules compagnes. Le rôle du phloème est de transporter la sève élaborée (7), riche en produits de la photosynthèse comme des sucres (6), depuis les organes source (ou producteurs) aux organes cible (ou consommateurs). Contrairement au xylème, le flux du phloème n’a pas de direction : la sève va circuler selon le gradient de concentration des sucres pour les emmener là où la plante en a le plus besoin, de haut en bas, de bas en haut, ou latéralement! La circulation pourrait se faire des feuilles où les sucres sont produits vers les racines où les sucres seront transformés en amidon pour être stockés pour l’hiver, ou bien depuis les feuilles aux fleurs ou aux fruits pour alimenter leur croissance, ou bien encore depuis les racines aux bourgeons pour stimuler leur ouverture au printemps.

Le phloème est une véritable autoroute d’information à travers toute la plante; en plus des sucres, il va transporter des messages d’une partie de la plante à une autre, comme un stimulus généré par une attaque d’insecte ou une infection localisée qui va déclencher une réaction de défense dans toute la plante. C’est comme si chaque plante a un réseau intranet personnel!

Sachant comment c’est complexe à l’intérieur d’une plante, peut-être verras-tu les nouvelles pousses vertes autour de toi d’un nouvel œil ce printemps!

NOTES

* Il existe certaines exceptions à la direction du flux dans le xylème, notamment chez les érables au printemps.

Par Sarah, éducatrice-naturaliste spécialiste

Sources images : Pixabay, GUEPE, Pixabay

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